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De la rédaction à la charpente : Le parcours inspirant de Jérémy, ex-journaliste caennais devenu artisan

Changer de voie professionnelle après plus d’une décennie immergé dans le tumulte de l’actualité locale, voilà le défi relevé par Jérémy, ancien journaliste à Caen ayant troqué la salle de rédaction contre la scierie et l’atelier. Figure emblématique pour de nombreux jeunes en quête de sens dans leur carrière, celui qui arpentait les rues carnets et appareil photo en main, scellait jadis l’événement sous la plume, façonne désormais des charpentes, des cabanes en bois et des projets sur-mesure. Derrière cette transition se cache une volonté profonde de renouer avec le concret et l’authentique, mais aussi une belle illustration de la manière dont la crise sanitaire a pu bousculer les certitudes et ouvrir de nouveaux horizons. Entre feuilles de chou et copeaux de bois, son itinéraire atypique vient bousculer les frontières entre métiers « de bureau » et artisanat, dévoilant le visage d’une génération prête à redéfinir la réussite professionnelle. À travers cette histoire singulière s’invite un regard neuf sur le rapport au travail, à la reconversion, mais aussi à la transmission des savoir-faire et à l’impact local de l’artisanat d’aujourd’hui.

De la Presse au Marteau : Naissance d’un nouveau parcours professionnel

Jérémy, surnommé depuis peu Le Reporter Charpentier par ses proches, n’a pas toujours eu la carrure du bâtisseur ni l’odeur du bois dans les mains. Pendant près de onze ans, son quotidien relevait du rythme effréné de la rédaction locale. Au sein de titres aussi incontournables que Liberté et Ouest-France, ce Caennais depuis l’enfance a vu défiler l’actualité sur les trottoirs, dans les salles de rédaction et au cœur des manifestations sociales. Plongeant dans l’urgence de la nouvelle, il enchaînait reportages, événements politiques, micro-trottoirs et portraits de figures locales — autant d’instantanés capturés par une plume agile, amoureuse des faits divers et des mouvements sociaux.

Pourtant, derrière l’apparence rassurante du métier de journaliste, se cachent des réalités changeantes. La profession, en constante mutation, exposée à la précarité, à la digitalisation, et soumise à la pression de l’instantanéité, fragilise parfois même les plus passionnés. L’arrivée du Covid-19 n’a fait qu’exacerber cette tension. Quand la France s’est confinée à répétition, « le terrain » est devenu une notion lointaine, l’interaction humaine se résumant à des appels téléphoniques, laissant chez Jérémy un goût amer d’inachevé et d’isolement. Un événement qui, pour beaucoup, fut l’occasion de questionner sa trajectoire et d’oser le pas de côté.

C’est alors que la réflexion s’impose : comment continuer à nourrir ce besoin d’action, de rencontre, de réalisation tangible, alors que la rédaction de nouvelles s’essouffle dans le virtuel ? L’idée de devenir charpentier, métier rare, essentiel et presque ancestral, fait son chemin. Loin d’être une lubie passagère, ce virage radical est le fruit d’un questionnement de fond. Les journaux sont remplacés par des planches de bois, la plume par la scie, sans pour autant effacer le besoin de « raconter une histoire », mais sous une autre forme. Jérémy décide donc d’emprunter la voie de la reconversion et, armé de détermination, s’inscrit à une formation intensive, convaincu que la satisfaction prend racine dans l’effort et la création concrète.

Ce passage du Bureau & Établi symbolise bien plus qu’un simple changement de décor : il exprime le courage de se réinventer, de braver les injonctions sociales qui opposent trop souvent intellectuel et manuel. À partir de là, un nouveau chapitre s’ouvre dans la vie de Jérémy, oscillant entre Charpentexte et Signature & Structure, alliant l’amour du beau geste à la rigueur apprise en salle de presse.

La crise comme catalyseur des reconversions inspirantes

À l’instar de nombreux professionnels piégés par les bouleversements de ces dernières années, Jérémy incarne cette vague de reconversions tournées vers le sens, la création et le palpable. L’expérience de la pandémie a révélé une appétence grandissante pour les métiers manuels et porteurs de valeur ajoutée locale, de la Plume et Charpente aux nouvelles structures que bâtissent les « artisans-nouveaux ». Ces transitions ne sont jamais le fruit du hasard, mais le résultat d’une maturation, d’un regard lucide porté sur l’équilibre entre technique et créativité, narration et construction durable. On y découvre une manière moderne de conjuguer journalisme et artisanat, « Bois de Plume » et « Rédaction & Bois », dans une alchimie inédite et inspirante pour toute une génération en quête d’ancrage.

Plume et Charpente : Réalités de la formation et découverte du métier

S’orienter vers la charpente à plus de trente-cinq ans suppose courage et humilité. Ne venant pas du monde du bâtiment, Jérémy intègre le parcours proposé par le GRETA, épaulé par la Région Normandie, dans les ateliers du lycée Dumont-d’Urville à Caen. Cette étape, baptisée Le Journal du Bois par les autres stagiaires moqueurs, se révèle déterminante. Chaque journée y commence par l’odeur des copeaux, la manipulation de la scie circulaire, la compréhension de l’équerre, sans oublier les craintes initiales face à des machines bruyantes et la rigueur imposée par la sécurité.

Au fil de neuf mois pleins, la découverte va bien au-delà des outils : c’est tout un univers de plans, d’épures, de calculs d’angle et de port de charge qui s’offre à lui. Une initiation à la conception d’élévations, dessins techniques propres au secteur, ainsi qu’à la confection de maquettes en bois, nécessaires à la visualisation des futures structures. Jérémy progresse dans ce nouvel environnement avec la même curiosité qui animait ses années de reportage, lors desquelles il posait la bonne question pour dénouer un sujet épineux.

L’apprentissage pratique s’inscrit ici dans le réel, souvent ponctué d’anecdotes marquantes. Qui aurait cru que l’on pourrait éprouver une même satisfaction devant un article bouclé à la rédaction ou une pièce en bois montée de ses mains ? « C’est gratifiant de se dire : c’est moi qui l’ai fait », témoigne Jérémy, fasciné par la possibilité de laisser une trace visible dans le paysage. Même les contraintes administratives, bien connues des artisans, deviennent des défis acceptés : la sécurité sur les chantiers, la lecture de normes, la gestion des outils de protection individuelle… autant de points qui structurent la nouvelle vie de l’ex-reporter.

Durant cette période de formation, les stages s’avèrent décisifs. Ils permettent de confronter la théorie aux imprévus du terrain, d’affiner les techniques apprises, mais aussi d’envisager la diversité des spécialités offertes par la profession. Jérémy découvre alors l’étendue du champ d’action du charpentier : parquets raffinés, assemblages de terrasses, réalisation de mobilier unique et construction de cabanes pour particuliers en quête d’insolite… Les possibilités ouvrent un monde où la créativité fait jeu égal avec la précision.

Un nouvel état d’esprit : la fierté du geste et du local

Ce passage de la Salle de rédaction à L’Atelier de Jérémy révèle une transformation intérieure inattendue : plus qu’une expertise technique, c’est une autre façon d’habiter le monde et d’agir sur son environnement. La reconversion n’efface pas le passé de journaliste, elle y ajoute la perspective du producteur, du bâtisseur, attentif à la responsabilité écologique de ses choix. Ce croisement entre Bureau & Établi, où l’on manie aussi bien la prose que la plane, illustre la puissance du « faire », vecteur de sens et d’identité retrouvé.

Signature & Structure : De l’intérim aux premiers chantiers indépendants

À l’issue de sa formation, diplôme en poche, Jérémy n’a pas attendu pour mettre son nouveau savoir-faire à profit. Il rejoint d’abord des chantiers en intérim, histoire de gagner rapidement en expérience auprès d’artisans confirmés. L’immersion est totale : du montage d’une charpente à la pose de bardages, en passant par la restauration d’anciens parquets, chaque jour offre son lot de défis pratiques. La routine du journal, réglée sur l’heure de tombée, laisse place à l’imprévu du terrain, où la météo peut tout bouleverser et où chaque projet est unique.

Avec le temps, mûrit l’idée de se lancer pleinement en indépendant. La création de son auto-entreprise, « Jérémy construction bois », opère la bascule définitive vers l’entrepreneuriat. Par cette structure, référence pour de nombreux habitants de Caen à la recherche de réalisations personnalisées, il propose « tout ce qui se fait en bois » : de la terrasse à la cabane perchée, en passant par du mobilier d’extérieur, des portails ou même des maisons en kit. L’étendue du spectre témoigne d’une agilité héritée de ses années de journaliste où jongler entre sujets très différents était quotidien.

L’intérêt pour l’utilisation de matériaux écologiques, la préférence donnée à la laine de bois plutôt qu’à la laine de verre, et le choix assumé des circuits courts — en s’approvisionnant auprès des scieries normandes — ancrent son activité dans une vision responsable. Ce souci du détail et cette transparence dans la démarche séduisent une clientèle de plus en plus attentive à l’origine des matières et à l’impact environnemental de ses choix d’aménagement.

À peine lancé, l’Atelier de Jérémy prend rapidement son envol grâce au bouche-à-oreille, soutenu par une communication active sur les réseaux sociaux. Le nom Charpentexte est parfois utilisé par ses clients, amusés de retrouver dans ses publications une touche d’écriture héritée de ses années de presse. Au fil des mois, le Reporter Charpentier réalise des chantiers qui lui ressemblent : « c’est gratifiant de passer devant une construction et de pouvoir dire : c’est moi qui l’ai fait », confie-t-il avec une simplicité désarmante.

Défis de l’artisanat et aspects logistiques

Évoluer en solo, c’est aussi composer avec un quotidien où l’on gère tout, de la prise de commande à la facturation, en passant par la logistique et les questions de sécurité. Les risques du métier, les questions d’assurance, les surprises des chantiers anciens ou la gestion des stocks constituent un univers aussi exigeant que stimulant. Jérémy porte sur sa nouvelle activité le regard du journaliste habitué à investiguer : chaque projet devient un sujet, chaque client une source, à ceci près que le résultat, cette fois, prend forme dans la matière. Parfois sollicité pour des réalisations originales, comme ce « mur des géants » inspiré de Ninja Warrior pour une salle de sport de Caen, il s’impose comme un véritable couteau suisse du bois capable de relever les défis les plus inattendus.

L’artisanat entre récit personnel et impact territorial : Le Journal du Bois en action

Quand on évoque le parcours de Jérémy, il est impossible de dissocier sa reconversion de l’impact local qu’elle génère. Là où le journaliste alimentait la chronique quotidienne, l’artisan inscrit désormais son empreinte dans le réel des quartiers et des campagnes normandes. En travaillant quasi exclusivement avec des forêts et scieries de proximité, il contribue activement à la dynamique régionale de revalorisation des filières bois, mais aussi à la relocalisation des savoir-faire. Les habitants affectionnent celle qui, sous le nom de L’Atelier de Jérémy, allie modernité et respect de la tradition, apportant des solutions sur mesure, à la fois créatives et respectueuses de l’environnement.

Cet enracinement dans le territoire rappelle combien le passage du Bureau & Établi s’inscrit dans une quête de cohérence et d’utilité sociale. Alors qu’une majorité de reconversions reste motivée par le souhait d’accomplissement personnel, elle peut aussi servir de moteur à l’économie locale, stimuler la transmission de compétences et participer à la rénovation du patrimoine régional. Les villes du Calvados, et particulièrement Caen, voient ainsi émerger une nouvelle génération d’artisans, ex-cadres ou ex-journalistes, pour qui la réussite ne se mesure plus à coup de salaire fixe ou de carrière linéaire, mais à la capacité de transformer concrètement son environnement.

Les réalisations emblématiques de Jérémy — cabanes perchées, maisons en bois à faible empreinte carbone, rénovations énergétiques soignées — sont ouvertes à la curiosité des riverains, parfois mises en scène sur Instagram ou célébrées dans des publications collaboratives comme Le Journal du Bois. Ce succès d’estime s’explique par la transparence du processus créatif, mais aussi par la proximité entretenue avec la clientèle. Les retours enthousiastes sur les réseaux témoignent d’un engouement local et contribuent à tisser un tissu social autour des métiers de la « Rédaction & Bois », où l’on écrit désormais l’histoire à la scie et à la vis.

Les nouveaux codes de la reconversion : authenticité, réseau, écologie

Le phénomène observé autour du personnage de Jérémy s’inscrit dans une évolution sociétale : la reconversion n’est plus marginale, mais bien une tendance de fond. Elle s’accompagne désormais de valeurs fortes, parmi lesquelles l’authenticité du geste, la recherche de sens, la solidarité professionnelle et le respect de l’environnement. Le collectif et l’entraide jouent un rôle clé, que ce soit par le partage d’expériences sur internet ou la création de réseaux d’anciens journalistes devenus artisans. Cette dynamique, palpable dans les projets menés par l’Atelier de Jérémy, fait écho à de multiples trajectoires similaires en France, où Plume et Charpente forment un binôme fertile, promesse de renouveau social.

Bois de Plume : Entre mémoire professionnelle et perspectives pour demain

Au fil du temps, Jérémy n’a pas effacé sa première vie : il s’en sert comme d’un socle pour mieux comprendre son nouveau métier. Son regard d’ancien journaliste continue de nourrir sa pratique artisanale. Il documente régulièrement ses chantiers, partage des anecdotes, diffuse les coulisses de ses réalisations sur ses réseaux. Par ce biais, l’ex-chroniqueur devient narrateur de son propre destin professionnel, inscrivant sa démarche dans une chaîne de transmission inspirante.

Ce dialogue entre passé de la Rédaction & Bois et présent de la Plume et Charpente nourrit non seulement la communication de son entreprise, mais aussi sa capacité à expliquer, vulgariser et transmettre. Jérémy anime par exemple des ateliers d’initiation à la menuiserie auprès de jeunes désireux de découvrir les métiers du bois, apportant, grâce à son parcours, une dimension pédagogique nouvelle. La curiosité journalistique devient ainsi moteur de l’apprentissage, la précision acquise dans la rédaction se retrouvant dans l’ajustement des assemblages.

Toujours en quête de nouvelles inspirations, il relève volontiers des défis sortant de l’ordinaire, comme la fabrication d’obstacles sportifs pour des événements locaux ou de cabanes perchées dans les arbres de la Suisse normande. L’expérience apprend que « tout peut s’apprendre, sauf la passion ». Cette volonté de continuer à apprendre, d’accueillir la nouveauté, caractérise la démarche du Reporter Charpentier : il se forme, expérimente, s’adapte aux demandes insolites, tout en fidélisant une clientèle sensible à la dimension personnalisée et éthique de ses réalisations.

La question de la pérennité, enfin, s’invite dans ses préoccupations. Comment maintenir le lien avec les anciennes rédactions tout en inscrivant son entreprise dans la durée ? Ici, l’organisation, la capacité à raconter ses réalisations et à cultiver un réseau professionnel très diversifié jouent un rôle clé. Cette souplesse, fruit d’un double parcours, permet d’imaginer des passerelles encore inédites entre rédaction et atelier, entre l’écriture et la structure matérielle. Soucieux d’élargir l’impact positif de son parcours, Jérémy envisage d’intervenir prochainement dans des conférences sur les reconversions, ou de publier un recueil illustré d’histoires croisées entre bois et presse, sous le titre évocateur Bois de Plume.

Conjuguant expérience médiatique et savoir-faire artisanal, Jérémy présente un exemple inspirant du mouvement de fond qui anime aujourd’hui la France professionnelle. Son parcours invite à penser des avenirs pluriels, aptes à relier Signature & Structure, transmission et innovation, pour redonner ses lettres de noblesse à la tradition artisanale revisite à l’heure du numérique. La prochaine aventure sera sans doute racontée à la fois d’une plume experte et d’une main habile, entre récit et charpente.

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